Si mon conjoint réalise des dépenses excessives et injustifiées, que se passe-t il en cas de séparation sans contrat de mariage ?
L’article 1421 du Code Civil donne pouvoir à chacun des époux d’administrer seul les biens communs, et de disposer seul des deniers communs. En d’autres termes, chaque époux peut dépenser l’argent commun comme bon lui semble.
Ce pouvoir trouve tout de même plusieurs limites. Les époux ne peuvent ainsi, l’un sans l’autre :
- donner un bien commun ou l’affecter à la garantie de la dette d’un tiers. (art. 1422 du C. Civ)
- léguer plus que leur part dans la communauté (art. 1423 du C. Civ)
- aliéner ou grever de droits réels les immeubles, fonds de commerce et exploitations dépendant de la communauté, non plus que les droits sociaux non négociables et les meubles corporels dont l’aliénation est soumise à publicité (art. 1424 C. Civ)
- donner à bail un fonds rural ou un immeuble à usage commercial, industriel ou artisanal dépendant de la communauté (art. 1425 C. Civ)
Rappelons que les salaires respectifs des époux constituent des biens communs. En effet l’article 1401 du Code Civil prévoit que :
« La communauté se compose activement des acquêts faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage, et provenant tant de leur industrie personnelle que des économies faites sur les fruits et revenus de leurs biens propres. »
Il s’ensuit que chaque époux a le pouvoir de dépenser seul les fonds du couple, sans avoir à solliciter l’accord de son conjoint. Cette règle s’explique par le fait que les dépenses faites par un conjoint sont présumées l’être dans l’intérêt de la communauté. Pour autant, cette présomption est susceptible d’être renversée par l’époux qui se plaindrait de l’utilisation qui a été faite des deniers communs.
Séparation d’un conjoint dépensier sans contrat de mariage : quels sont vos droits ?
C’est ainsi que la jurisprudence met à la charge de l’époux dépensier une obligation d’information de son conjoint quant à l’affectation des sommes importantes.
La Cour de Cassation a récemment eu l’occasion de rappeler cette règle désormais établie s’agissant d’un époux qui avait dépensé un peu plus de 117.000 € extraits d’un compte épargne durant le mariage. En appel, l’épouse avait été déboutée au motif que la dépense ayant été faite durant le mariage, elle était présumée avoir été faite dans l’intérêt commun. Elle obtiendra gain de cause en cassation, faute pour son conjoint de justifier de l’affectation de cette somme :
« Attendu que si un époux a le pouvoir d’administrer seul les biens communs et de disposer seul des deniers communs dont l’emploi est présumé avoir été fait dans l’intérêt de la communauté, il doit cependant, lors de la liquidation, s’il en est requis, informer son conjoint de l’affectation des sommes importantes prélevées sur la communauté qu’il soutient avoir été employées dans l’intérêt commun »
En conclusion, si chaque époux peut dépenser l’argent commun sans l’accord de l’autre, il devra, en cas de divorce, justifier sa dépense ! A défaut, ou s’il s’avère que l’affectation n’était pas dans l’intérêt de la communauté, la somme dépensée sera réintégrée à l’actif communautaire, c‘est à dire qu’elle sera réputée ne pas avoir été réalisée, et l’autre époux sera en droit d’en récupérer la moitié.
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