La clause de non-concurrence entre s’applique au terme du contrat conclu entre deux IDEL. Elle impose à celui qui la doit de ne pas se réinstaller ni exercer dans un périmètre géographique déterminé pendant une certaine durée. L’objectif est ainsi de protéger la patientèle de l’infirmière subissant la rupture du contrat puisque son ex-collègue ne pourra plus intervenir sur les patients une fois l’exercice commun terminé.
L’insertion d’une telle clause est possible quel que soit le type de contrat (collaboration, exercice en commun, SCP…) et est même prévue par le Code de Déontologie s’agissant du contrat de remplacement (Article R. 4312-87 du Code de la Santé Publique) :
« Lorsqu’il a terminé sa mission et assuré la continuité des soins, l’infirmier remplaçant abandonne l’ensemble de ses activités de remplacement auprès de la clientèle de l’infirmier remplacé.
L’infirmier qui remplace un de ses collègues pendant une période supérieure à trois mois, consécutifs ou non, ne doit pas, pendant une période de deux ans, s’installer dans un cabinet où il puisse entrer en concurrence directe avec le confrère remplacé et, éventuellement, avec les infirmiers exerçant en association ou en société avec celui-ci, à moins qu’il n’y ait entre les intéressés un accord, lequel doit être notifié au conseil départemental de l’ordre. Lorsqu’un tel accord n’a pu être obtenu, l’affaire doit être soumise audit conseil qui apprécie l’opportunité et décide de l’installation. »
Il est donc tentant d’intégrer à son contrat de collaboration ou d’exercice en commun une clause de non-concurrence.
Les limites d’une clause de non-concurrence
La validité d’une clause de non-concurrence est subordonnée à de nombreuses conditions, et une clause mal rédigée ou intégrée à un contrat mal choisi peut s’avérer totalement inefficace !
La protection recherchée est alors réduite à néant, et l’infirmière qui aura quitté le cabinet sera libre de se maintenir sur le secteur, les patients demeurant alors totalement libres de faire appel à elle.
La Cour de Cassation a défini les conditions de validité de la clause de non-concurrence dans son arrêt du 10 juillet 2002. Ainsi, pour être valable la clause doit être justifiée et proportionnée à l’objectif poursuivi, ce qui implique notamment d’être limitée dans le temps et dans l’espace.
Cette proportionnalité s’apprécie de manière concrète, et donc au cas par cas.
D’un cabinet à un autre, la clause de non-concurrence peut donc couvrir un périmètre de 20 km autour du cabinet, ou être limité à un km.
Afin de définir le périmètre et la durée de la clause de non-concurrence, il est donc vivement conseillé de faire appel à un professionnel, à même de vous orienter et de vous conseiller dans la rédaction de cette clause. En effet une clause disproportionnée ne peut être réduite par le Juge, et sera tout bonnement considérée comme nulle. Elle ne s’appliquera donc pas du tout !
De même, la clause insérée dans un contrat utilisé à mauvais escient ne permettra pas d’actionner son bénéfice.
Par exemple, si la remplaçante s’apparentait en réalité plus à une collaboratrice (ce que l’on appelle fréquemment la « collaboration déguisée »), elle pourra faire valoir cet argument pour échapper à l’obligation de non-concurrence, alors même que celle-ci est prévue par le Code de Déontologie.
De la même manière, si la clause de non-concurrence peut valablement être intégrée à un contrat de collaboration libérale entre infirmières, elle ne pourrait produire aucun effet si le contrat était considéré comme nul. Or, les causes de nullité sur ce type de contrat sont extrêmement nombreuses.
La nullité d’une clause de non-concurrence
La nullité d’une clause de non-concurrence est lourde de conséquences puisque son objectif protecteur sera totalement réduit à néant. Ainsi, votre collègue pourra quitter le cabinet, mais continuer à exercer seule ou accompagnée auprès des patients commun, dont la répartition se fera de manière totalement anarchique.
Exemple N°1
Un exemple, hélas fréquent, permet de mesurer le risque d’une clause de non-concurrence mal rédigée :
Une infirmière achète une patientèle auprès d’une autre, déjà installée (seule ou avec d’autres infirmières), qui s’engage(nt) à travailler avec elle. Un contrat d’exercice en commun est signé parallèlement à la vente. Peu de temps après, la ou les collègue(s) vendeuse(s) décide(nt) de mettre fin à l’exercice commun, et de poursuivre seule(s). L’infirmière qui a acheté la patientèle est donc en droit de revendiquer le bénéfice de la clause de non-concurrence afin de protéger la patientèle qu’elle vient d’acquérir, c’est-à-dire son revenu ! Mais, si d’aventure la clause intégrée au contrat signée avec la ou les autre(s) collègue(s) n’est pas valable, elle ne pourra les obliger à quitter le secteur et à cesser d’intervenir auprès des patients. Ce seront alors ces derniers qui choisiront librement à quelle infirmière ils entendent confier la poursuite de leurs soins.
Entre la ou les infirmière(s) qui les suit depuis des années et la nouvelle, fraichement arrivée et déjà sortie du cabinet, qui pensez-vous qu’ils choisiront ?
Exemple N°2
Une infirmière fait appel à une remplaçante, peu de temps avant de prendre sa retraite. Dans la perspective de sa fin de carrière, elle entend revendre sa patientèle à un successeur. Dans l’hypothèse où le contrat de remplacement aurait été mal utilisé, voir qu’il n’y ait pas eu de contrat du tout, l’infirmière partant à la retraite ne pourra obliger sa remplaçante à respecter l’obligation de non-concurrence. L’ex-remplaçante pourra donc rester sur le secteur, et être choisie par les patients pour la poursuite des soins.
Dans ce cadre, il sera particulièrement difficile pour l’infirmière prenant sa retraite, alors même qu’elle a créé le cabinet et exploité la patientèle durant des années, de revendre à un successeur.
En effet, achèteriez-vous une patientèle en sachant qu’une infirmière qui soigne les patients depuis longtemps reste sur le secteur et qu’ils peuvent la choisir pour poursuivre leurs soins ?
Ces exemples mettent également en lumière le fait qu’il existe de multiples moyens d’échapper à la clause de non-concurrence à laquelle une infirmière peut-être tenue.
Si vous estimez être tenue illégitimement d’une obligation de non-concurrence, ou souhaitez y échapper, les moyens sont nombreux !
Dans ce cadre, l’assistance d’un professionnel est indispensable afin d’utiliser à bon escient les arguments juridiques dont vous pourriez disposer, et continuer à soigner vos patients en dépit d’une séparation avec votre ou vos collègues.
Pour protéger son activité professionnelle, s’assurer de la validité de la clause de non-concurrence est donc indispensable, que vous soyez tenue de respecter une obligation de non-concurrence ou que vous souhaitiez vous assurer de son respect par votre collègue. Le cabinet BOLZAN vous conseille et vous assiste, qu’il s’agisse de rédiger votre contrat ou d’analyser votre situation juridique afin de préserver votre investissement et parfois le travail de toute une vie !