Médecins, dentistes, sages-femmes, IDEL, kinés…, ces dernières années, de nombreux professionnels de santé se sont vus accusés de fraude à l’Assurance Maladie. Face aux indus, les caisses d’Assurance Maladie disposent d’un panel d’actions leur permettant de choisir les poursuites qu’elles entendent engager à l’encontre du professionnel contrôlé : procédure conventionnelle, procédure civile en répétition d’indu, procédure disciplinaire devant la Section des Assurances Sociales, ou encore procédure pénale par le dépôt d’une plainte auprès du Procureur de la République. En pratique, l’on constate une tendance de plus en plus marquée à actionner la voie pénale et les condamnations de professionnels de santé libéraux pour escroquerie ne cessent de se multiplier, en raison d’une politique plus sévère de la CPAM, et d’une jurisprudence de plus en plus exigeante.

Ainsi, lorsqu’elle constate ce qu’elle considère être une fraude (il s’agira généralement de la durée des soins ou de soins non réalisés), l’Assurance Maladie optera pour un dépôt de plainte pénale auprès du Procureur, ce qui aura pour conséquence d’engager une enquête préliminaire sur l’activité du professionnel de santé libéral concerné sans que celui-ci n’en soit informé. Les moyens d’action dont dispose les services de Police sont évidemment très vastes, et bien plus difficiles à contester que ceux qui peuvent être mis en œuvre par les agents de la CPAM : planques, analyses de relevés bancaires, auditions de témoins…

A l’issue de l’enquête, le Procureur décidera des chefs de poursuites qu’il entend engager. En matière de facturation d’actes de soins, le chef d’accusation le plus fréquent est celui de l’escroquerie prévu à l’article 313-1 du code pénal :

« L’escroquerie est le fait, soit par l’usage d’un faux nom ou d’une fausse qualité, soit par l’abus d’une qualité vraie, soit par l’emploi de manœuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d’un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge. »

L’infraction d’escroquerie est punie de trois ans d’emprisonnement et de 375.000,00 € d’amendes. Lorsqu’il s’agit d’une escroquerie à la CPAM cette peine est portée à 7 ans d’emprisonnement et une amende de 750.000,00 € (article 313-2 du code pénal).

Mais, l’on retrouve également le faux et usage de faux, prévu à l’article 441-1 du Code Pénal :

« Constitue un faux toute altération frauduleuse de la vérité, de nature à causer un préjudice et accomplie par quelque moyen que ce soit, dans un écrit ou tout autre support d’expression de la pensée qui a pour objet ou qui peut avoir pour effet d’établir la preuve d’un droit ou d’un fait ayant des conséquences juridiques. »

Le faux et l’usage de faux sont punis de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende.

En matière pénale, l’Assurance Maladie reporte la charge de l’enquête sur les services de Police, qui vont finalement mener l’équivalent du contrôle dont se charge la caisse dans le cadre de la procédure civile en répétition d’indu. La caisse interviendra seulement en qualité de partie civile au procès, ce qui lui permettra de réclamer le montant de l’indu en tant que victime de l’escroquerie.

L’IDEL faisant l’objet de poursuites pénales pour un indu n’a donc pas un mais deux adversaires : le Procureur qui réclamera une peine pénale (l’emprisonnement, l’amende…) et la caisse d’Assurance Maladie qui réclamera le montant de son indu.

Professionnel de santé poursuivi au pénal pour fraude à l’Assurance Maladie : faut-il pour autant s’avouer vaincu ?

Les professionnels de santé se sentent souvent acculés par la nature pénale des poursuites dont ils font l’objet, et nous déplorons de constater qu’ils ressentent fréquemment l’enquête pénale comme encore moins contestable que le contrôle mené par la CPAM.

Or, en pratique tel est loin d’être le cas, et le choix de la procédure pénale n’est pas toujours le bon de la part de la CPAM ! En effet si la caisse dispose d’un panel d’actions, choisir la bonne résulte d’une véritable analyse stratégique, et reporter l’enquête sur le Ministère Public n’est pas systématiquement un bon calcul. Si la CPAM se décharge de l’enquête, elle perdra réciproquement toute chance d’obtenir le paiement de son indu en cas de relaxe. Or, en laissant le Ministère Public mener l’enquête et le procès, elle perd toute maîtrise du dossier.

Et, il faut notamment rappeler qu’en matière pénale, toute condamnation suppose de prouver que deux critères sont réunis : d’une part l’élément dit « matériel » et d’autre part l’élément intentionnel.

L’exemple de l’IDEL

S’agissant de l’escroquerie, l’élément matériel résulte quasi systématiquement de la mauvaise facturation par l’infirmier libéral, par exemple le fait d’avoir facturé 2 AIS 3 en étant resté moins de 30 minutes.

L’élément intentionnel réside en la volonté de l’IDEL de tromper la CPAM afin d’encaisser des honoraires. Or sur ce point il est permis de discuter de l’intention de l’infirmier de tronquer la vérité sur sa facturation, puisque bien souvent il s’agit plus d’une erreur de facturation que d’une volonté réelle de la part de l’infirmier d’escroquer la CPAM. Par exemple, un acte non réalisé peut avoir été facturé tout simplement par automatisme du logiciel, sans avoir été décoché manuellement sur certaines dates, mais non par une volonté réelle de facturer des actes fictifs.

Ainsi, comme en matière civile, il est surtout primordial de s’entourer de professionnels aguerris à la matière et à la procédure, afin d’accéder à votre dossier au plus vite, et d’en analyser les failles et les points forts.

Récemment, le Cabinet BOLZAN Avocats s’est réjoui d’obtenir une double relaxe pour deux infirmières libérales poursuivies pour escroquerie avec un indu évalué par la CPAM à plus de 50.000,00 € chacune.

Les IDEL étaient notamment poursuivies pour avoir trompé la CPAM sur la durée réelle des soins (facturation d’AIS 3 au-delà de la durée des soins réellement réalisés).

Après avoir démontré l’absence de tout caractère intentionnel de la part des infirmières libérales, et en dépit des planques dont elles avaient fait l’objet et des auditions des patients, Maître THIBAUT obtiendra une double relaxe pour ses clientes, qui n’auront donc ni sanction pénale… ni indu à payer !

En cas de poursuites pénales pour escroquerie, faux et usage de faux, ou toute autre procédure d’indu dont vous feriez l’objet, n’hésitez pas à prendre contact avec le Cabinet BOLZAN Avocats qui saura se charger de la défense de vos intérêts et vous assister au mieux à chaque stade de la procédure.