L’exercice en société de la profession d’IDEL connait une tendance à l’augmentation ces dernières années, notamment pour des raisons d’optimisation fiscale s’agissant des sociétés unipersonnelles (SELARL, SELAS…) ou d’organisation entre IDEL s’agissant des SCM.

Les formes de sociétés offertes aux professionnels de santé libéraux sont multiples, et répondaient chacune à un régime spécifique, ce qui, au fil des années, rendaient de moins en moins lisibles les règles applicables. C’est pourquoi la loi du 14 février 2022 (loi n°2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante, article 7) a posé le double objectif de :

  1. Clarifier, simplifier et mettre en cohérence les règles relatives aux professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, d’une part, en précisant les règles communes qui leur sont applicables et, d’autre part, en adaptant les différents régimes juridiques leur permettant d’exercer sous forme de société ;
  2. Faciliter le développement et le financement des structures d’exercice des professions libérales soumises à un statut législatif ou réglementaire ou dont le titre est protégé, à l’exclusion de toute ouverture supplémentaire à des tiers extérieurs à ces professions du capital et des droits de vote.

Pour les atteindre, l’ordonnance du 8 février 2023 (ordonnance n°2023-77 du 8 février 2023 relative à l’exercice en société des professions libérales réglementées) est venue abroger les précédents textes portant sur les SCP et SEL, pour créer un seul et unique texte de référence applicable à l’ensemble des sociétés pouvant être créées entre IDEL. On y retrouve ainsi les Société Civiles de Moyens, (SCM), les Sociétés civiles professionnelles (les SCP), les Sociétés d’Exercice Libéral (SELARL, SELAS…), et aussi les SPFPL (Sociétés de Participation Financières de Professions Libérales) plus couramment appelé « Holding ».

Une grande partie des professionnels de santé libéraux sont donc concernés par ce texte, ne serait-ce que parce qu’ils partagent les frais courants par le biais d’une SCM.

Concrètement, quels changements pour les IDEL exerçant en société ?

Bien que l’ordonnance reprennent les différents types de sociétés offertes aux IDEL (SCP, SCM, SEL, SPFPL…) seule la Société d’Exercice Libéral se trouve réellement impactée, et cela qu’elle soit à associé unique ou non.

L’Ordonnance du 8 février 2023 pose des règles générales, et renvoie à la publication d’un prochain décret le rôle d’apporter plus de précisions. Mais, d’ores et déjà les nouvelles obligations à la charge des IDEL exerçant en SEL sont définies :

La communication annuelle des statuts, informations et de tout changement au Conseil de l’Ordre des Infirmiers

Jusque-là, les IDEL exerçant en SEL étaient tenus de communiquer les statuts de la société au CDOI uniquement lors de la création de la société, ou à l’occasion de modifications substantielles telle que l’arrivée d’un nouvel associé.

Désormais, la communication devra se faire chaque année, et porter sur un état du capital social de la société et des droits de votes afférents, l‘organisation de sa gouvernance ainsi qu’une mise à jour des statuts (article 44 de l’Ordonnance du 8 février 2023 n°2023-77).

Concrètement, les IDEL exerçant en SEL devront communiquer chaque année au Conseil de l’Ordre des Infirmiers :

  • Le montant du capital social et sa répartition entre les associés,
  • Les informations relatives à la gouvernance de la société, c’est-à-dire sur les gérants ou dirigeants nommés au sein de la société,
  • La mise à jour éventuelle de leurs statuts. L’ordonnance ne précisant pas les mises à jours éventuelles, nous en déduisons qu’il s’agit de toute clause modifiée (dénomination, organisation, droit de retrait, clause de non-concurrence…).

Cette obligation de communication repose sur la volonté de confier au Conseil de l’Ordre de Infirmiers la mission de veiller au respect du principe d’indépendance professionnelle, principe déontologique fondamental rappelé à plusieurs reprises dans le Code de Déontologie des Infirmiers :

Article R. 4312-6 du Code de Déontologie :

L’infirmier ne peut aliéner son indépendance professionnelle sous quelque forme que ce soit.

Article R. 4312-32 du Code de la Santé Publique :

L’infirmier est personnellement responsable de ses décisions ainsi que des actes professionnels qu’il est habilité à effectuer.

Il ne doit pas exercer sa profession dans des conditions qui puissent compromettre son indépendance, la qualité des soins ou la sécurité des personnes prises en charge.

En effet, des statuts qui confiraient un droit de vote ou de direction trop important à un seul infirmier au détriment des autres seraient contraires à ce principe d’indépendance professionnelle.

La définition du professionnel exerçant

L’obligation de communication annuelle permet également au Conseil de l’Ordre de veiller à ce que les parts de la société soient détenues majoritairement par des professionnels dit « exerçant », c’est-à-dire :

La personne physique ayant qualité pour exercer sa profession ou son ministère, enregistrée en France conformément aux textes qui réglementent la profession, et qui réalise de façon indépendante des actes relevant de sa profession ou de son ministère.

La seule réalisation d’acte de gestion ne confère pas la qualité de professionnel exerçant. 

En l’état, l’ordonnance du 8 février 2023 fixe la détention du capital social à au moins 50 % par des professionnels exerçant et les personnes n’ayant pas la qualité de professionnel exerçant ne peuvent détenir plus de 49,99% du capital en globalité et à hauteur de 25 % à titre individuel.

Un prochain décret déterminera si ces proportions sont modifiées ou non.

IDEL exerçant en SEL : Les démarches à réaliser

Il appartient aux IDEL exerçant en SEL individuelle ou collective de procéder à la mise à jour de leurs statuts afin de se mettre en conformité avec l’Ordonnance du 8 février 2023, et ce au plus vite puisque l’obligation de communication annuelle au Conseil de l’Ordre des Infirmiers entre en vigueur dès le mois de septembre 2024.

Pour les autres modifications apportées par le texte, les SEL disposeront d’un délai d’un an à compter du 1er septembre 2024 pour se mettre en conformité.

Afin de vous aider dans la mise en conformité de votre société (SCM, SCP, SELARL, SELAS…) et d’éviter toute déconvenue ou mise en demeure de la part du Conseil de l’Ordre des Infirmiers, le Cabinet Bolzan Avocats vous accompagne dans ces changements et procède pour vous aux modifications et formalités requises afin de respecter les dispositions en vigueur. Contactez-nous.