Vous vous installez en tant qu’infirmier libéral et vous avez des doutes concernant votre local professionnel ? Vous souhaitez connaître vos droits et obligations ? Nous répondons ici aux questions les plus fréquentes.

Suis-je obligé(e) d’avoir un local pour abriter mon cabinet infirmier ?

Oui.

L’article R. 4312-75 du Code de la Santé Publique prohibe l’exercice forain de la profession, sauf à titre dérogatoire pour un motif de santé publique. Il est donc obligatoire pour un infirmier libéral de disposer d’un local professionnel, dont l’existence réelle peut être vérifiée. En ce sens, une simple plaque apposée sur un local sans cabinet réel est passible de sanction.

Soulignons que les CPAM peuvent également vérifier l’existence réelle du cabinet, s’agissant d’une condition au conventionnement.

Puis-je avoir plusieurs adresses professionnelles / un cabinet secondaire ?

Oui, mais sur autorisation.

L’exercice en sites distincts est autorisé. Toutefois, il est subordonné à l’accord préalable du Conseil Départemental de l’Ordre Infirmier. Pour obtenir cette autorisation, il appartient à l’infirmier demandeur de justifier d’une carence ou d’une insuffisance de l’offre de soins préjudiciable aux besoins des patients ou à la continuité des soins.

La procédure d’autorisation est prévue à l’article R. 4312-72 du Code de la Santé Publique, qui précise que le refus par le Conseil Départemental de l’Ordre peut être contesté, en premier lieu, devant le Conseil National de l’Ordre.

Mon cabinet d’infirmier doit-il répondre à des normes spécifiques ?

Oui.

L’article R 4312-67 du Code de la Santé Publique décrit les conditions auxquelles doit répondre le cabinet infirmier :

L’infirmier dispose, au lieu de son exercice professionnel, d’une installation adaptée et de moyens techniques pertinents pour assurer l’accueil, la bonne exécution des soins, la sécurité des patients ainsi que le respect du secret professionnel.

Il veille notamment à la stérilisation et à la décontamination des dispositifs médicaux qu’il utilise et à l’élimination des déchets de soins selon les procédures réglementaires.

Il ne doit pas exercer sa profession dans des conditions qui puissent compromettre la qualité des soins et des actes professionnels ou la sécurité des personnes examinées.

Le local professionnel de l’infirmier libéral doit évidemment respecter des normes d’hygiène, notamment précisées à l’article R. 4312-37 du Code de la Santé Publique :

L’infirmier respecte et fait respecter les règles d’hygiène, dans sa personne, dans l’administration des soins, dans l’utilisation des matériels et dans la tenue des locaux professionnels.

Il s’assure de la bonne gestion des déchets qui résultent de ses actes professionnels, selon les procédures réglementaires.

Enfin, en vertu de la loi du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, le local infirmier doit répondre aux normes d’accessibilité. Un guide à destination des professionnels de santé a été publié par la délégation ministérielle à l’accessibilité.

Pour les constructions préexistantes, des dérogations ont été prévues (mais supposent d’être demandées !), celles-ci tenant à :

  • l’impossibilité technique liée à l’environnement ou à la structure du bâtiment
  • la préservation du patrimoine architectural ; 
  • la disproportion manifeste entre la mise en accessibilité et ses conséquences.

Attention ! La dérogation ne peut être obtenue que par une décision expresse, le silence de l’administration ne pouvant s’analyser en une autorisation implicite.

Mon cabinet d’infirmier libéral peut-il être installé à mon domicile ?

Oui.

Il n’existe aucune interdiction formelle d’installer son cabinet infirmier à son domicile, sous réserve qu’il respecte les normes exigées.

L’IDEL locataire doit par ailleurs s’assurer que son bail d’habitation autorise l’hébergement d’une activité professionnelle (rare en pratique !). Lorsque l’IDEL est propriétaire de son logement, il lui appartiendra de vérifier que le règlement de copropriété ne s’y oppose pas, et de solliciter de l’administration les autorisations adéquates (changement de destination ou d’usage). Il est conseillé de se rapprocher, avant tout exercice au sein de son habitation, de la Mairie qui sera à même de vous renseigner précisément sur les démarches administratives nécessaires dans votre situation.

Puis-je partager mon local professionnel d’infirmier libéral avec d’autres professionnels ?

Oui et non.

Des IDELs exerçant en commun peuvent naturellement partager le même local, ce qui est d’ailleurs recommandé puisque le partage de l’activité sans adresse commune peut être considéré (et sanctionné !) comme un cabinet secondaire non-autorisé. 

En revanche lorsque l’activité n’est pas partagée et qu’un infirmier exerce déjà au sein de l’immeuble, il convient de solliciter l’accord de celui-ci. Si l’infirmier pré-établi ne donne pas son accord, l’autorisation d’installation peut être demandée au Conseil de l’Ordre qui ne la refusera que dans la mesure où cette installation peut créer un risque de confusion entre les cabinets dans l’esprit du public (article R. 4312-68 du Code de la Santé Publique).

Le partage de local avec d’autres professionnels de santé est bien plus limité. Tout d’abord, rappelons qu’aux termes de l’article R. 4312-77 du Code de la Santé Publique :

Il est interdit à un infirmier d’exercer sa profession dans un local commercial et dans tout local où sont mis en vente des médicaments ou des appareils ou produits ayant un rapport avec son activité professionnelle.

Il s’agit d’une interdiction stricte.

En revanche, vis-à-vis d’autres professionnels de santé, les règles sont plus souples. En effet il n’existe pas, à proprement parler, d’interdiction formelle de partager son lieu d’exercice avec un professionnel de santé de spécialité différente, et le partage est même formalisé par le statut de maison de santé par exemple. Les limites sont en fait posées par l’interdiction du compérage, et la liberté de choix par le patient de son professionnel de santé. Il s’agit de principes communs à la déontologie de chaque profession de santé, et c’est en vertu de ces principes que le partage des locaux pourra être sanctionné. S’il altère l’indépendance des professionnels concernés, ou laisse supposer un compérage de nature à entraver la liberté de choix des patients, le partage pourra être sanctionné. L’appréciation se fera donc au cas par cas.

A titre d’exemple, la Cour d’Appel de Montpellier n’a pas retenu le compérage dans le cadre d’un partage de locaux entre un médecin et des infirmières car aucun élément ne permettait de prouver une atteinte à la liberté du patient de choisir son professionnel de santé (CA Montpellier, 27 fév. 2007).

De ce point de vue néanmoins, le partage d’une même salle de soin entre professionnels de spécialité différente apparaît à proscrire.

Puis-je apposer une signalétique à l’entrée de mon cabinet infirmier ?

Oui, mais limitée.

La signalétique pouvant agrémenter le cabinet est encadrée. Aux termes de l’article R. 4312-70 du Code de la Santé Publique, elle se limite à une plaque sur laquelle l’infirmier peut mentionner :

  • ses nom et prénoms,
  • ses numéros de téléphone,
  • ses jours et heures de consultation,
  • sa situation vis-à-vis des organismes d’assurance maladie,
  • ses titres, diplômes et fonctions reconnus par le Conseil national de l’ordre.

Plusieurs plaques peuvent être apposées, en conformité avec l’alinéa 3 de cette disposition :

Une plaque peut être apposée à l’entrée de l’immeuble et une autre à la porte du cabinet. Lorsque la disposition des lieux l’impose, une signalisation intermédiaire peut être prévue.

Le mot d’ordre concernant la signalétique demeure la discrétion. En effet si une signalétique est tolérée par l’Ordre Infirmier il convient de s’abstenir de tout élément ostentatoire, pouvant évoquer une activité commerciale.

Rappelons qu’avant sa modification par décret du 22 décembre 2020, l’article R. 4312-76 du Code de la Santé Publique prévoyait :

La profession d’infirmier ne doit pas être pratiquée comme un commerce.

Sont interdits tous procédés directs ou indirects de réclame ou de publicité et notamment une signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale.

Depuis le décret du 22 décembre 2020 le second alinéa a toutefois disparu, témoignant de l’assouplissement des règles relatives à la publicité. Mais, la signalétique du cabinet demeure limitée par l’article R. 4312-70 dont les alinéas 4 et 5 prévoient :

Ces indications doivent être présentées avec discrétion. L’infirmier tient compte des recommandations émises par le conseil national de l’ordre relatives aux plaques professionnelles et à tout autre élément de signalétique des cabinets.

Une signalétique spécifique à la profession, telle que définie par le Conseil national de l’ordre, peut être apposée sur la plaque ou sur la façade.